Un accord sur les lois sur le blasphème pourrait "aggraver la situation des droits de l'homme au Pakistan"

Rana-Sanaullah

"Aller de l'avant avec toute initiative visant à modifier l'ATA pour y inclure l'article 295-C ne fera qu'aggraver la situation des droits de l'homme au Pakistan."

Au Pakistan, un parti politique extrémiste musulman demande à ce que les accusations de blasphème soient jugées en vertu de la loi antiterroriste (ATA). Un accord a été signé entre le ministre fédéral de l'Intérieur Rana Sanaullah, le ministre des Affaires économiques Sardar Ayaz Sadiq et les dirigeants du Tehreek-e-Labbaik Pakistan (TLP).

Selon Morning Star News, le gouvernement a également accepté de créer une "aile de lutte contre le blasphème" sous l'autorité de l'Agence fédérale d'enquête. Elle sera chargée de prendre des mesures contre la diffusion de "contenu blasphématoire" sur Internet.

Asad Jamal est avocat musulman de la Cour suprême. Il fait part de ses craintes auprès de Morning Star News. "Aller de l'avant avec toute initiative visant à modifier l'ATA pour y inclure l'article 295-C ne fera qu'aggraver la situation des droits de l'homme au Pakistan", déplore-t-il.

L'avocat dénonce plusieurs biais. Tout d'abord, la gestion des déclarations des accusés.

"Les déclarations des accusés prises en garde à vue en vertu du CrPC [Code de procédure pénale] sont généralement considérées comme involontaires par les tribunaux, c'est pourquoi les accusés ont la possibilité d'enregistrer à nouveau leurs déclarations dans les salles d'audience. Cependant, les tribunaux antiterroristes admettent régulièrement les déclarations faites en garde à vue, ce qui peut poser un grave problème pour l'accusé."

Ensuite, il craint une double stigmatisation des accusés, en tant que blasphémateur, puis en tant que terroriste.

Pour Asad Jamal, "de telles redditions [par le gouvernement] encouragent les forces religieuses à abuser des lois avec plus de vigueur et d'impunité".

"J'espère que le gouvernement réalisera les conséquences de cet accord avec le TLP et s'efforcera plutôt de freiner les fausses accusations de blasphème qui ont terni l'image du Pakistan dans le monde."

Des craintes partagées par la directrice générale de la Voice Society, Aneeqa Maria, qui craint "des procès inéquitables".

"Si un accusé de blasphème est jugé en vertu des lois antiterroristes au Pakistan, cela aurait un impact et des conséquences importants sur les victimes. En associant le blasphème au terrorisme, l'accusé peut faire face à des protections juridiques limitées et à un risque accru de violence ou d'attaques d'autodéfense à son encontre."

M.C.

Image : Asianet-Pakistan / Shutterstock

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